Pas un nuage en ce début d’après-midi du 9 avril 2022 à l’île d’Yeu. Un vent modéré de force 3 souffle du nord-ouest, avec une houle résiduelle héritée du mauvais temps des derniers jours. Trois trentenaires embarquent sur le Black Bird, un semi-rigide de 7,60 mètres. Un bon bateau pour naviguer dans ces conditions. Sauf que la mer est encore froide, à 11 °C, et que seul le barreur porte un VFI – ou vêtement de flottaison individuel.
Tout va bien jusqu’à ce que le Black Bird rencontre une vague plus forte que les autres en passant au-dessus de l’une des nombreuses roches immergées qui tapissent le fond à la pointe de la Gournaise, au nord de l’île. Le choc est très violent. Le bateau tient bon et ne se retourne pas, mais les deux occupants qui ne portent pas de VFI sont éjectés. Resté aux commandes, le troisième, choqué, parvient à appeler les pompiers par téléphone mobile.
Le Codis 85 (centre opérationnel départemental d’incendie et de secours de Vendée) n’a pas de sauveteurs disponibles et informe le CROSS Étel, qui diffuse aussitôt un message de détresse. Le navire à passagers Ogia l’intercepte et fait route vers le semi-rigide. Le CROSS Étel active alors l’hélicoptère de la Sécurité civile Dragon 17, avise le SAMU maritime puis engage le canot tous temps SNS 084 Président Louis Bernard de la station de l’île d’Yeu.
Celui-ci appareille en quatre minutes, avec à bord un médecin et deux nageurs sauveteurs SNSM, dont un pompier. Au même moment, l’Ogia repère l’homme tombé à l’eau, mais ne peut pas s’en approcher et reste sur zone en veillant aussi sur le semi-rigide. Le SNS 084 arrive, aborde le Black Bird et embarque son occupant, toujours en état de choc. Des sauveteurs prennent sa place à bord pour aller chercher le naufragé, qu’ils transfèrent, conscient mais en hypothermie sévère, sur le SNS 084, avant de récupérer, trois minutes plus tard, la jeune femme, en arrêt cardio-respiratoire. Ils la transfèrent sur le canot, qui regagne au plus vite le port tandis que les sauveteurs tentent de la ranimer.
Rejoints à quai par un deuxième médecin de l’île d’Yeu, ils poursuivent leurs efforts pendant près d’une heure. Sans résultat. Pour sa part, le naufragé en hypothermie est transféré vers l’hôpital de La Roche-sur-Yon par l’hélicoptère du SMUR 85, tandis que, toujours en état de choc, le barreur du Black Bird est hospitalisé à l’île d’Yeu.
L’analyse d’Éric Taraud, président de la station de l’île d’Yeu
« Le port d’un gilet de sauvetage est indispensable en toutes circonstances, même sur une annexe ! Seul le barreur du semi-rigide en portait. Si la femme avait été équipée, elle aurait pu garder la tête hors de l’eau, explique Éric Taraud, président de la station SNSM de l’île d’Yeu. La température de l’homme que nous avons repêché était tombée à 30 °C. » Le VFI lui aurait peut-être permis d’économiser ses forces. On peut aussi penser qu’un appel direct au 196 aurait fait gagner quelques minutes. Surtout, « il faut bien connaître les lieux avant de s’y aventurer. C’est une zone très dangereuse, avec beaucoup de roches proches de la surface. En moyenne, nous déplorons un noyé tous les deux ans dans ce secteur. Une raison de plus pour porter un VFI en toutes circonstances. »
Nos sauveteurs sont formés et entraînés pour effectuer ce type de sauvetage. Grâce à votre soutien, vous les aidez à être présents la prochaine fois !
Équipage engagé
Canot tous temps SNS 084 Président Louis Bernard
Patron : Éric Taraud
Mécanicien : Alexis Martin
Radio : Christian Rafin
Nageur sauveteur : Fabien Ricolleau
Équipiers : Teddy Bigaud, Didier Martin
Médecin : Pierre Viguier
Article rédigé par Dominique Malécot, diffusé dans le magazine Sauvetage n°160 (2ème trimestre 2022)